Beuveries et excès (Richard)

En dehors de sa famille, Levi avait peu de véritables amis. Généralement il s’agissait plus de connaissances ou de relations commerciales qu’autre chose. Il se méfiait de tout le monde. C’était sans doute dû au fait qu’il avait failli être tué par son ancien bras droit. Cela remettait en question pas mal de choses à ses yeux. A qui faire confiance désormais ? Mais malgré sa méfiance, il conservait un bon ami qui, il l’espérait, n’oserait jamais le trahir malgré leur pseudo rivalité. Après tout, l’homme en question faisait le même métier que lui : il permettait à d’autres de pouvoir mettre la main sur diverses choses, très souvent interdites par l’Etat. Magouilles, trafics, … tout ça était commun aux deux hommes. Sauf que Richard se permettait davantage de choses que Levi n’acceptait pas dans son propre commerce. Ainsi, bien que rivaux sur certains points, ils parvenaient à se diversifier suffisamment pour ne pas se marcher sur les pieds. Ensemble, ils faisaient en sorte que New Haven et le reste de l’Etat ne manquent de rien. Des hommes bons, auraient dit certains !

Le juif venait de conclure un contrat très juteux et, en plus de vouloir s’en vanter auprès de son ami, il désirait aussi qu’ils fêtent ça ensemble. Après tout, ils avaient un but plus ou moins commun. Il l’avait ainsi donc invité via un messager. Pour l’heure il n’avait pas eu le temps d’aller le voir en personne et il n’était d’ailleurs pas toujours facile de le trouver. Mais il savait que l’homme répondrait pas la positive. Après tout, il lui proposait de venir festoyer et boire en sa compagnie. S’il désirait des filles, il n’aurait cependant qu’à venir avec ! Levi ne faisait aucun trafic humain et les filles qui bossaient pour lui étaient libres de faire ce qu’elles voulaient, même celles qui se vendaient. Il n’en avait jamais touché aucune et il ne comptait pas commencer demain.

Assis dans son fauteuil sous le perron, près du petit étang qu’abritait sa propriété, il remplissait certains papiers importants. Un de ses serviteurs s’approcha pour le prévenir que le dénommé Monsieur Cutler était là. Levi rangea les papiers dans la pochette pour éviter qu’ils ne s’envolent et atterrissent dans l’étang puis se leva à l’approche de Richard.

« Alors mon ami, tu as fait bon voyage ? » plaisanta t-il. Après tout, ils vivaient dans la même ville « Prend place ! » ajouta t-il en désignant le fauteuil en face de celui qu’il venait de quitter « Je viens de récupérer des cigares venant tout droit de Cuba. Ils ont un petit goût épicé. Ca te tente ? »

Il fallait bien commencer par quelque chose. Levi se rassit et agita la main pour signaler à ses domestiques de se bouger pour leur ramener de quoi boire et manger. La fin de journée allait être consacrée à l’amusement mais rien n’empêchait de parler un peu boulot.

@Richard Cutler

Richard termina de signer les papiers que sa sœur lui tendait. Il pesta légèrement parce qu'il trouvait ça particulièrement pénible et long et qu'il ne s'agissait là que de formalité. L'homme n'aimait pas forcément s'encombrer de tout ça. Il dirigeait oralement et le reste devait être fait par ses gens. Tant que tout était fait comme il l'avait exigé, le reste lui importait peu. En vérité, il était la tête pensante du clan et sa sœur se chargeait de tout le reste. Enfin, il apposa sa dernière signature après avoir judicieusement pris le soin de bien lire les quelques lignes du document et s'adossa contre son fauteuil. Satisfaite, sa sœur remballa tous les papiers et quitta le bureau, laissant Richard seul avec ses pensées. Qu'allait il faire maintenant ? Il pourrait aller s'étendre sous le grand saule pleureur de son jardin pour faire une sieste et boire son whisky tranquillement. Ou bien il pourrait continuer de planifier le futur meurtre du Maire de New Haven. Il serra légèrement les mâchoires, sachant bien que le maire ne serait pas si simple à atteindre.

L'homme se leva tranquillement et s'étira avant de quitter la maison pour aller s'installer sur un fauteuil, dehors, à l'ombre. Il faisait chaud aujourd'hui, encore une fois. Mais Richard ne s'en formalisait pas. Il avait à peine poser les fesses sur le fauteuil qu'une domestique s'approcha avec un jeune garçon. Soupira d'agacement, Richard les observa du regard en les sommant de se dépêcher de parler avant qu'il ne lui prenne l'envie d'en étrangler un. Visiblement, Levi Goldman l'invitait à fêter quelque chose. Richard se leva d'un bond, tout content de retrouver son ami. Il congédia le messager et sa domestique, se rendant à sa chambre pour se changer. Levi était plus ou moins un ami. Richard l'appréciait car il comprenait bien ses activités mais il se méfiait malgré tout. Il suffisait que le juif se sente un peu menacer par Richard pour qu'il chercher à l'étriper et le rayer de New Haven. On ne pouvait jamais réellement faire confiance aux gens. Sauf peut être en sa sœur et en Jaime. Il beugla qu'on lui prépare son cheval, terminant de se préparer. Jaime n'était pas là et il avait besoin de quelqu'un pour l'accompagner. Il désigna deux hommes peu souriant et quitta sa villa pour se rendre chez Levi.

La propriété de Levi était particulièrement jolie mais elle ne valait pas l'immense terrain que Richard possédait en Louisiane, bordée par les grands champs de coton et canne à sucre. Il aimait surtout les arbres immenses qui offraient de l'ombre et de la fraîcheur. Richard mit pieds à terre et s'approcha de Levi, tout sourire.

« Ça n'est jamais désagréable de se promener à cheval, surtout que tu ne vis pas loin ! » Il retira son chapeau et s'installa. « Des cubains ? Mh, pourquoi pas ! Je ne connais pas Cuba mais il paraît que les femmes y sont... délicieuses. »

Il lança un sourire plein de sous-entendu à Levi. Après tout, Richard était réputé pour être un homme à femme. Il n'arrivait pas à se caser avec une en particulier, il se lassait beaucoup trop vite des femmes et avait besoin de les collectionner. Il ne serait pas contre d'ajouter quelques cubaines à son tableau de chasse. Richard retira sa veste et la plia soigneusement pour la poser sur le dossier de son fauteuil.

« Et alors, qu'est ce qu'on fête ? »

La réponse de Richard à sa question fit rire Levi. Lui-même se déplaçait très peu à cheval. Il fallait dire qu’il quittait rarement New Haven et qu’il se contentait de se déplacer à pied ou en calèche privée. S’il devait aller plus loin, il prenait un train privé également. Il n’était clairement pas le meilleur acheteur de chevaux de la région. Richard, lui, semblait bien plus à l’aise à ce niveau là.

« Tu es venu en cheval ?? Allons, la marche à pieds, il n’y a que ça de vrai ! Surtout que le quartier est agréable à découvrir en marchant ! » se moqua t-il avec un sourire « Je n’y ai jamais mis les pieds non plus alors je ne pourrais te le confirmer… »

Ceci dit, il connaissait bien une cubaine. Mais de là à en faire une généralité, il y avait un gouffre. Et puisqu’elle était effectivement délicieuse, Levi n’avait aucunement envie de partager l’information avec son ami et rival. Bien qu’il l’appréciait, Richard était un homme à femme et le juif n’avait pas envie de partager le peu de femmes qu’il fréquentait. Il était d’ailleurs surpris qu’il n’ait pas fait venir des filles d’autres régions et pays pour son propre commerce. Levi, quant à lui, ne faisait pas de trafic humain. Ceux qui travaillaient pour lui le faisaient de leur propre volonté. C’était la différence la plus notable entre les deux hommes. Mais cela ne les empêchait pas de bien s’entendre.

L’homme d’affaires prit la boite de cigares et la posa sur la petite table entre eux avant de l’ouvrir, dévoilant de beaux cigares tout droit venus de Cuba. Levi en prit un et le renifla longuement, appréciant son parfum particulier. Il sentait bon les épices et n’avait rien à voir avec ce que l’on pouvait d’ordinaire trouver en Amérique.

« Ce que l’on fête… Je viens tout juste de racheter une grande compagnie de bateaux ! La National Rivers ! Je te laisse imaginer tous les navires que je vais pouvoir utiliser pour nos commerces respectifs… Cela va augmenter d’un coup le trafic et la distribution des ressources. Un sacré plus ! Un investissement qui valait le coup. »

Il coupa le bout de son cigare et l’alluma avant de proposer à Richard de faire de même pour lui. Après quelques bouffées, il attrapa les verres pour les remplir de whisky.

« Et toi ? Rien de nouveau ? Je suis surpris que tu sois venu  seul ! »

@Richard Cutler