Pour toi, j'enfreindrai toutes les lois (Richard)

Pour toi, j'enfreindrai toutes les lois.

L’oreille collée sur la porte du bureau de son hôte, Margaret attend le silence. Elle écoute avec attention les bruits d’agonie. Un sourire étire ses lèvres lorsqu’elle n’entend plus rien, son entreprise a fonctionné, comme toujours. De l’arsenic au fond du verre de sa victime, une dose d’opium sur le bureau et le tour est joué. Celui qui découvrira la dépouille pensera à une mort par overdose et la rumeur se répandra bien vite en ville. Personne ne pensera une seule seconde que la douce et gentille Mademoiselle Cutler pourrait faire une chose pareille. Elle continuera sa petite vie, tandis que son frère aura le champ libre suite à l’élimination de ce fouineur trop proche de la vérité.

La blonde prend le temps d’arranger ses vêtements et sa coiffure avant de sortir par la porte de derrière. Elle ne risque pas d’être vue, en ce dimanche matin, elle sait très bien que la quasi-totalité de ville se trouve à l’église, lieu qu’elle ne fréquente jamais, n’étant pas du tout croyante. Mais, Margaret prend ses précautions et après s’être assurée que personne ne la voit sortir de la demeure, elle regagne avec discrétion une route plus grande sur laquelle elle se détend et prend le chemin de chez elle d’un pas léger.

Comme prévu, elle arrive chez elle avant la fin de la messe. Elle a croisé tout au plus quatre personnes. Une fois à l’intérieur, Maggie retire son chapeau. Elle se sert un verre de whisky et allume nonchalamment une cigarette, une attitude qui n’a alors rien de féminin. Mais elle s’en fiche, Margaret emmerde les vieux conservateurs bienpensants. De son pas léger, elle se dirige sur la plage privée faisant partie de la propriété et s’installe sur un fauteuil de jardin, sous une ombrelle, pour siroter son alcool fort.

Les yeux fixés sur l’océan, Maggie pense au meurtre qu’elle vient de commettre. Elle ne ressent aucune once de culpabilité ou de remord. Aucun meurtre n’a d’importance à ses yeux quand il s’agit d’assurer la réussite de son frère.

-Que Dieu me pardonne, lance-t-elle cyniquement pour elle-même tout en trinquant avec l’air avant de laisser un rire cristallin s’échapper de sa gorge. Quelle ironie de lui demander son pardon là-haut après un assassinat le jour du Seigneur.

Elle attend son frère, il ne devrait pas tarder à rentrer de l’église. Quand il sera là, elle lui annoncera qu’elle a réalisé sa volonté et ils aviseront ensuite, peut-être demandera-t-il à Maggie de trouver des clients ou de s’assurer du transport de telle ou telle marchandise. Peut-être même aura-t-il entendu des rumeurs en écoutant des conversations à la messe. Elle hausse les épaules avant de s’installer plus confortablement. Le bruit des vagues la berce et la belle finit par fermer les yeux et tomber dans un sommeil profond.

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Des sourires, des mains à serrer. Tout un monde plein d'hypocrisie dans lequel Richard nageait avec une aisance insolente. Il adressait de larges sourires à des hommes qui pensaient fort qu'il était un homme de confiance. Il embrassait le dos des mains de leurs femmes en les agrémentant de clin d’œil suggestifs, les faisant rougir. Sûr qu'elles imaginaient bien mettre le quarantenaire dans leur lit quand leur mari n'était pas là, parti en voyage d'affaire ou en train de conclure un gros contrat à l'autre bout de la ville. Les femmes étaient faibles. De pitoyables menteuses et profiteuses. Mais qui profitait le plus dans cette affaire ? Après avoir épuisé la dame, Richard ne se gênait pas pour fouiller et en savoir plus sur l'homme. Ensuite, il envoyait ses hommes ou sa sœur s'en occuper. Après avoir bien récupéré le magot bien évidemment. Richard ne faisait jamais rien sans intérêt. Coucher avec ces femmes n'était pas une réelle partie de plaisir pour lui mais pour le bien du clan il voulait bien se dévouer à la tâche. Il n'allait tout de même pas envoyer Jaime faire ça. La plupart des femmes en avaient peur avec son air d'ours en colère.

Une fois qu'il eu terminé de saluer absolument tout le monde mais surtout le pasteur qui le voyait comme une bénédiction, Richard enfourcha son cheval pour reprendre le chemin de sa maison. Lui, il se foutait pas mal des sermons à la con du pasteur, il désirait simplement conserver cette image d'homme généreux et près à tout pour la communauté. C'est la raison pour laquelle il avait fait un gros don à l'église. Un don qu'il récupérerait plus tard de toute manière, il le savait. Enfin, il arriva chez lui, reprenant alors son véritable visage. Une fois que le cheval fut confié à l’écuyer, Richard entra dans sa maison, remarquant l'odeur de sa sœur. Elle devait donc être rentrée. Après avoir harcelé une domestique pur savoir où se trouvait sa sœur, il alluma un cigare et quitta la maison pour la plage. Il faisait une chaleur a crever et il n'avait aucune envie d'être au soleil. Lorsqu'il s'approcha, sa sœur était en train de dormir profondément. Il attrapa une chaise et prit place près d'elle, l'observant. Délicatement, il poussa une mèche blonde du visage de sa sœur, détaillant ses traits. Il y avait longtemps qu'elle n'était plus une enfant et il le remarquait bien désormais. Elle était devenue une belle femme et il détestait voir les hommes lui tourner autour. Il en avait tué bien beaucoup pour avoir osé essayer de la séduire. Il ne pouvait pas s'empêcher de penser que Margaret était à lui et rien qu'à lui. Ça ne changerait jamais. Il en était fou. Doucement, sa main caressa sa joue, savourant la douceur de sa peau. Il descendit doucement vers son cou, caressant ensuite le haut de son torse avant de retirer sa main en serrant les mâchoires. Elle le rendait fou. Il remarqua qu'elle s'agitait alors il s'affala sur sa chaise.

« Alors, comment ça s'est passé ? »

Richard tira sur son cigare avant d'en cracher la fumée, les yeux rivés sur les vagues. L'océan était agité aujourd'hui avec le vent malgré tout, il était chaud et Richard finit par retirer sa veste et déboutonna le haut de sa chemise.

Pour toi, j'enfreindrai toutes les lois.

Margaret ne sait pas depuis combien de temps elle dort, elle sait seulement qu’elle a chaud et que des caresses se déplacent sur le haut de son corps. Loin de la faire sursauter, ces caresses l’apaisent, lui donnent envie de se retourner et de s’endormir encore plus profondément tout en gardant cette chaleur au fond d’elle. Margaret pense qu’elle rêve. Puis le toucher s’arrête et elle entend le bruit d’une personne qui s’installe à côté d’elle. Elle bouge d’abord lentement avant de s’étirer et de bailler discrètement. Elle ouvre et ferme ses paupières plusieurs fois alors que son frère lui demande comment ça s’est passé. Elle ne sait même pas de quoi il parle, elle veut seulement qu’il continue de parler, parce qu’elle aime sa voix. Parce que sa voix la berce autant qu’elle l’obsède. Elle sourit, jusqu’il y a quelques années, elle ne pensait pas qu’il était possible d’avoir une passion comme la sienne pour une autre personne.

Une fois pleinement réveillée, elle pose son regard sur Richard qui s’est mis à l’aise. Elle laisse ses yeux courir un instant sur les traits de son visage, il est beau et elle a la chance de le voir tous les jours. Alors qu’il fixe les vagues, le regard de Maggie s’aventure sur le haut du torse de l’homme. Il est musclé et elle a soudainement envie de le prendre dans ses bras. Rapidement, elle détourne le regard, gênée par ses propres pensées. Il en faut peu pour choquer la belle, mais il s’agit de son frère, d’où lui viennent de telles pensées ? Cela fait deux ou trois fois qu’en observant Richard, Margaret se dit qu’elle aimerait qu’il ne soit pas son frère. En réalité, il ne l’est pas, mais c’est tout comme. Elle ne sait pas ce qu’il lui arrive mais elle trouve cela très dérangeant.

Elle se râcle doucement la gorge pour se redonner contenance. Elle décide de se plonger dans la conversation alors que son regard plonge dans l’océan. Elle réfléchit un instant à la réponse qu’elle va donner. Elle a appris à ne jamais être trop optimiste. Mais elle sait qu’il ne faut pas trop douter de soi-même, cela donne l’air coupable.

-Comme d’habitude, finit-elle par dire. Il est mort, je n’ai laissé aucune trace me rendant suspecte, j’ai laissé la dose d’opium, personne ne m’a vue entrer, personne ne m’a vue sortir.

La blonde reste laconique, elle a rapidement pris l’habitude de la vie que Richard lui offre, elle y a également très vite pris goût. Ce n’est pas la première fois qu’elle tue un homme et son frère connait bien son mode opératoire. Selon Maggie, il n’y a pas de quoi s’étaler pendant des heures.

-Tu achèteras le journal demain, continue-t-elle, tu liras alors une nouvelle déclaration de guerre aux vendeurs de drogues, lance-t-elle cynique.

Elle tourne à nouveau son visage vers l’homme avant de lui offrir un sourire doux.

-Et toi ? L’église comme ça s’est passé ? Tu as réussi à rester éveillé pendant le sermon ? demande-t-elle moqueuse. Tu as entendu des choses intéressantes ? questionne-t-elle ensuite avec sérieux.

En attendant une réponse, Margaret continue de l’observer, elle aimerait qu’il ait parfois un air léger, voire doux sur le visage. Elle attend et se retient avec peine de s’approcher encore pour poser sa tête contre lui comme lorsqu’elle avait huit ans et qu’elle cherchait du réconfort au milieu de ses terreurs nocturnes après s’être échappée du ranch et que son dos la brûlait encore.

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Cette femme était la beauté incarnée et Richard crevait tellement d'envie de la prendre chaque fois qu'il la croisait. Il lui arrivait de l'éviter toute la journée quand les pulsions étaient trop fort. Il ne savait pas si c'était parce qu'il conservait l'image de cette enfant qu'il avait sauvé et prit pour petite sœur. Sauf que le corps de Margaret s'était bien développé et il comprenait que n'importe quel homme pouvait craquer pour elle. La bienséance le poussait à ne pas aller trop loin dans ses désirs mais un jour, tout ça finira mal. Il soupira, affalé sur sa chaise. Aussi, pour éviter de trop penser à tout ça, l'homme réclama qu'elle lui raconte sa matinée. Margaret ne pointait pas le bout de son nez à l'église, ce qui en dérangeait certains. Mais Richard ne s'en préoccupait pas le moins du monde. Un fin sourire se dessina sur le visage de Richard.

« Voilà des mots qui font plaisir à mes oreilles. Je savais qu'avec toi le travail serait parfaitement fait. »

Parce qu'il avait une confiance aveugle en elle. Il savait que Margaret ne le décevrait pas. Il lui adressa un léger sourire, fier d'elle. Un peu plus et il se penchait pour aller lui tapoter le crâne. Le jeune homme soupira doucement en reposant ses yeux sur l'océan agité.

« Très bien... J'ai hâte de voir le journal de demain ! »

Un soupir de satisfaction s'échappa de ses lèvres alors qu'il se remit à fumer tranquillement. C'était une excellente journée qui s'annonçait. L'homme tira sur son cigare avant de faire une moue songeuse. L'église était quand même l'endroit le plus chiant où il devait se rendre pour faire bonne figure.

« Mh... C'était pénible, comme toujours. Mais je pense que je vais rendre une petite visite à la femme de Mr Tallman. Elle semble... » Il sourit, amusé. « Intéressante. Si tu vois ce que je veux dire. Et son mari possède des terres donc de l'argent et j'ai besoin d'en savoir plus sur lui. Je sais qu'il part la semaine prochaine assez loin pour quelques jours. Alors je pense que je vais rendre une petite visite à sa femme. »

Il pourrait envoyer quelqu'un d'autre pour ça mais lui, ça ne le dérangeait pas après tout. S'il pouvait se faire plaisir en mettant la main à pâte, il n'hésitait pas.

Pour toi, j'enfreindrai toutes les lois.

Margaret esquisse un sourire alors que Richard lui assure qu’elle fait parfaitement son travail. Elle a de l’expérience maintenant et elle a bénéficié des conseils d’un bon professeur. Elle observe ledit professeur alors qu’elle l’interroge sur les banalités de l’église dont il revient. Elle frémit lorsqu’il répond. Maggie sent son corps entier se crisper. Elle n’aime pas l’allusion que son frère vient de faire. Bien sûr qu’elle voit ce qu’il veut dire quand il affirme que Madame Tallman est intéressante. La belle tente de se ressaisir en se répétant que c’est pour les affaires mais rien n’y fait.

Elle sait ce que son frère fait de son temps libre, elle est au courant qu’il aime les femmes et que bon nombre des épouses de ses clients lui ont déjà ouvert les cuisses. La blonde supporte de moins en moins ces idées. En plus de le trouver trop à son goût, depuis quelques temps, Maggie éprouve de la jalousie lorsqu’elle pense à ce que son frère fait avec d’autres femmes. Ce n’est pas le genre de relation qu’elle veut avec son frère, enfin peut-être un peu, mais elle aimerait le garder pour elle.

Margaret ne connait pas le caractère de Madame Tallman, mais elle connait celui de son frère, elle sait que lorsqu’il veut quelque chose, il l’obtient toujours, c’est la même chose avec les femmes. Elle-même n’est pas sûre qu’elle pourrait résister à la place de Madame Tallman. Heureusement qu’ils n’ont pas de liens de sang se met-elle à penser honteuse.

-Tu es vraiment obligée d’y aller ? lance-t-elle en se mordillant puérilement la lèvre pour l’attendrir.

Elle le veut pour elle, les cadeaux qu’il lui ramène lui plaise mais elle veut plus, elle veut sa présence le plus souvent possible. Pourtant, Margaret n’est pas une sainte, elle aussi fréquente des hommes. Mais ce n’est pas pareil, cela reste exceptionnel, les partenaires sont peu nombreux et Margaret ne les choisit pas pour les affaires, simplement parce qu’ils lui plaisent.

Elle lève à nouveau, lentement, son regard sur Richard tout en posant sa main légère sur son bras.

-Tu ne veux pas rester avec moi ? Au lieu de me laisser seule dans cette grande maison une nouvelle fois…

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Richard était ici pour asseoir son pouvoir. Il voulait dominer la ville pour le moment. Il commencerait par détrôner ce maire qui ne servait à rien. Une fois qu'il serait à la tête de la ville, il prendrait ensuite la place du gouverneur. Et à ce moment là, il annulerait les lois inutiles pour n'y mettre que celles qui lui donne de l'avantage. L'alcool, la violence, la prostitution et l'esclavage seraient de nouveau au goût du jour. Mais pour en arriver là, il devait user d'intelligence et surtout, être partout. Et parfois, être partout voulait aussi dire aller coucher avec des femmes déjà mariées et se sentant délaissées par leur mari. Lui, il n'éprouvait rien pour ces femmes. Elles n'étaient utiles que pour accéder à des informations importantes.

L'homme soupira doucement en recrachant la fumée de son cigare. Rapidement le vent l'éloigna d'eux. Il posa son regard sur sa sœur qui semblait chercher à le retenir. Il fronça les sourcils.

« Bien sur... Tu veux quoi ? Que j'envoie Jamie ? Il foutrait la trouille a un ours alors imagine la pauvre femme face à lui. Et puis, je sais ce que je cherche. Quand elle dormira, j'aurais tout le loisir de fouiller le bureau de son cher mari. »

Richard lâcha un nouveau soupir, comme si cet acte pesait sur ses épaules. Il y allait parce qu'il savait que c'était l'une des meilleures façons pour lui de récolter ce dont il avait besoin. Il aurait préféré avoir à saouler Monsieur Tallman pour lui soutirer toutes les informations nécessaires. Malheureusement, l'homme ne semblait pas apprécier de transgresser les lois. Alors, se taper sa femme était devenue une option.

Richard observa Margaret. Son comportement était assez étrange mais il lui donnait envie de rester. Il voulait la prendre dans ses bras, contre lui. Savourer l'odeur de sa peau et pouvoir y déposer ses lèvres avec délicatesse. Parfois, il rêvait de pouvoir faire glisser cette robe qui en cachait beaucoup trop à son goût. Parfois, il ressentait des excès de violence s'animer au fond de lui. Il savait qu'un jour il finirait par faire une connerie et il le regretterait sûrement. Tant qu'il arrivait à se contrôler, tout irait bien. Il attrapa la main délicate de Maggie dans sa main et la porta à ses lèvres, déposant un baiser dessus.

« Ma chère Maggie. Il y a tout une foule de domestiques dans cette maison, tu n'es pas seule. »

Il fallait qu'elle cesse de le torturer avant qu'il ne craque. Richard repoussa la main de la blonde avant de se lever doucement en s'étirant.

« Bon, je vais aller prendre un bain. »

Il fit craquer son dos avant de regarder sa sœur. Il avait presque envie de lui proposer de le rejoindre. Il caressa doucement sa joue.

« Tu es devenue si belle. »

Puis il s'éloigna assez vivement, hélant une domestique pour qu'elle lui prépare un bain rapidement.